jeudi 16 juillet 2009

Les paradis fiscaux ne sont pas invicibles

Les paradis fiscaux ne sont pas invicibles

Les multinationales partent en Suisse. Dernière en date, McDonald's, qui rejoint la horde d'artistes et de sportifs soucieux de payer moins d'impôts. Les Etats voisins se plaignent de cette concurrence fiscale. Mais ne font vraiment pas grand chose pour lutter contre.



(photo: Simon Vanherweghe - Flickr - cc)
Les multinationales étasuniennes se bousculent pour installer leur siège européen en Suisse. Après Procter & Gamble, Google et Yahoo, ce serait au tour de McDonald’s de déplacer son siège de Londres à Genève dès l’automne, selon les informations de Libération.

Un cercle vicieux

Le comportement des multinationales est malheureusement compréhensible. En effet, les dirigeants cherchent à maximiser les profits pour leurs actionnaires. Le différentiel grandissant de fiscalité entre la Suisse et les autres pays européens (la Grande-Bretagne augmente certains impôts à partir de juillet) les pousse logiquement à profiter de la faible fiscalité Suisse. Cela rappelle le comportement des sportifs et des artistes, qui profitent également de la libre circulation des capitaux.

Mais certaines entreprises n’hésitent pas à utiliser toutes les ressources de la comptabilité pour déplacer leurs profits des pays à forte fiscalité vers ceux des « paradis fiscaux » comme la Suisse. Le problème est que la concurrence fiscale met une pression redoutable sur les finances publiques à un moment difficile et qu’elle pousse la fiscalité à la baisse, comme le montre la baisse progressive de l’impôt sur les sociétés depuis plusieurs années. Gageons que cette pression ne prendra fin que quand les taux seront nuls…

Car c’est là une des conséquences de l’anarchie économique imposée par les néolibéraux de gauche comme de droite : la libre circulation des capitaux permet une baisse des impôts pour une infime minorité par le chantage au départ qu’ils exercent. Aux Etats-Unis, ce chantage prend une forme plus extrême puisque les Etats se font la guerre à coup de subventions pour obtenir l’implantation d’une usine ou d’un siège social, gageant des années de rentrée d’impôt en aides.

Peut-on faire quelque chose?

Les paradis fiscaux ne sont pas invicibles
C’est la question la plus importante car le fatalisme peut l’emporter tant il est difficile aujourd’hui de remettre en cause une déréglementation qui ne profite qu’à une infime minorité. Beaucoup ne voient pas de solution et il est vrai qu’il serait très difficile de faire quoi que ce soit dans le cadre de traités, notamment européens, qui sanctifient une libéralisation promue objectif indépassable. Pourtant, les conséquences catastrophiques de cette anarchie économique imposent de rechercher des solutions.

La première action peut toucher tous les artistes et sportifs qui émigrent dans ces enfers dorés dès qu’ils gagnent un peu d’argent. Pourquoi ne pas rendre beaucoup plus difficile la possibilité d’installation dans ces pays ? Il serait possible de rendre beaucoup moins intéressant leur départ en instaurant un moratoire de plusieurs années, pendant lequel ils devraient continuer à payer leurs impôts dans leur pays d’origine, voire même de limiter leur capacité d’installation dans ces pays.

Au niveau des entreprises, plusieurs solutions peuvent être envisagées. L’Espagne, par exemple, a imposé que des inspecteurs publics travaillent directement au sein des banques pour instaurer une surveillance plus active. On peut également imaginer modifier les règles d’imposition (en fonction du chiffre d’affaire par exemple) pour limiter le pouvoir de nuisance des prix de transfert (prix de cession d’une filiale à l’autre), utilisés pour déplacer les profits d’un pays à forte fiscalité à un autre.

Depuis des années, la plupart des hommes politiques déplorent la concurrence fiscale. Pourtant, la plupart lui ont permis de se développer et presque aucun ne propose de solutions concrètes pour en venir à bout. Il est grand temps de se réveiller.

Source : Libération

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Jeudi 16 Juillet 2009
Laurent Pinsolle - Blogueur associé
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